Aphyosemion striatum (Boulenger, 1911)
Les premières importations européennes datent de 1961.
Le mot Killies désigne de façon familière des poissons de la famille des Cyprinodontidés ovipares. Ils comptent de très nombreuses espèces qui vivent quasiment dans le monde entier On en trouve en Afrique, en Asie, en Amérique ainsi que dans le sud de l’Europe mais pas en Australie… Ils sont de petite taille, mesurent 4 à 7 cm, et très colorés. Parmi ces nombreuses espèces, on en trouve qui sont faciles à garder et à reproduire en petit bac spécifique. Ce sont des poissons très intéressants à observer et qui vivent d’une façon un peu particulière : Certains comme les Rivulus sont capables de survivre quelques heures hors de l’eau, d’autres comme les Nothobranchius et les Cynolebias par exemple pondent des œufs qui peuvent sécher quelques semaines quand les flaques d’eau s’assèchent en été et sont capables d’éclore lors des prochaines pluies. À l’état sauvage, on les trouve dans des gouilles, des flaques de quelques litres, dans des marais peu profonds ou des petits ruisseaux partiellement asséchés pendant une partie de l’année. Les paramètres physico-chimiques de leur milieu varient de façon importante d’un mois à l’autre selon la quantité de pluie.
On distingue deux grandes catégories de Killies Ceux qui vivent dans des milieux qui ne s’assèchent pas, et dont le développement des oeufs se fait toujours dans l’eau et ceux qui sont dits annuels, qui proviennent de milieux subissant une période d’assèchement total. Les adultes meurent à la fin de la saison, mais leurs œufs incubent dans la terre et éclosent lors des premières pluies.
Parmi les Killies non annuels, on trouve les Aphyosemion striatum, des A. australe, des A.gardneri, des Aplocheilus lineatus, des Epiplatys annulatus.
Dans les Killies annuels, on peut citer les Roloffia occidentalis, les Cynelobias whitei, les Nothobranchius rachovi
Les Aphyosemion striatum sont originaires du Gabon, petit pays d’Afrique occidentale. Ils ont été pêchés la première fois dans l’Abanga, un des affluent de l’Ogoué, dans le nord du Gabon. Ils vivent également dans la région du Cap Estérias et de Lambaréné. L’eau de ces rivières possède un pH compris 5.5 et 7.5 et une dureté très basse. Parmi les autres Aphyosemion striés, on trouve A.microphtalmus (Lambert & Gery 1967), A.ogoense (Pellegrin 1930), A.simulans et A.punctatum (Radda & Purzl 1977). Ils préfèrent les zones à faible courant, et peu profondes.
Le A.striatum est un excellent poisson pour débuter dans la maintenance des Killies. Il est peu exigeant quant au volume du bac, supporte quelques écarts de température, se reproduit aisément, et par rapport à d’autres Killies, n’est pas une espèce annuelle mais peut vivre plus de 2 ans en aquarium.
Son seul problème peut être la difficulté de s’en procurer. Les marchands ne les tiennent pas à disposition, à cause de leur courte durée de vie et de leur besoin d’eau douce : Il faut les commander spécialement, ou les rapporter de voyage, … Plus simplement on peut en acheter à un éleveur amateur ou directement aux membres du Killie Club de France. On peut aussi parfois trouver dans les bourses aquariophiles, les congrès ou dans les clubs, des jeunes poissons ou des œufs à vendre.
Quand on les voit dans les bacs des magasins, les Killies sont ternes et peu mis en valeur. Il faut admettre que ce ne sont pas des poissons à l’aise en bac d’ensemble ou en groupe, et qu’ils ont besoin d’un bac spécifique pour bien vivre et se faire admirer.
Heureusement qu’ils ont peu d’exigences et qu’ils vivent dans des petits volumes. Un aquarium de 15 ou 20 litres permet de garder un couple ou un trio (1 mâle et 2 femelles) dans de bonnes conditions et d’obtenir régulièrement des reproductions. On se laisse d’ailleurs vite tenter par d’autres espèces et l’on se retrouve alors avec 3,4 ou 5 petits bacs destinés à la maintenance de ces jolis poissons, peu faits pour être mélangés car ils s’hybrident facilement.
Heureusement qu’il n’y a pas besoin d’un matériel bien compliqué : Les A.striatum par exemple se contentent d’un bac en plastique de 15 litres, sans chauffage et juste décoré de tiges de plantes flottantes. Ils se sentent bien dans un petit volume encombré de végétation, de mousse de Java ou de Riccia. Ce ne sont pas des bons nageurs qui apprécient l’espace mais des poissons qui aiment se cacher parmi la végétation mais qui sont de bons sauteurs, capables de bondir hors de l’eau si le bac n’est pas bien fermé.
Il faut prévoir un sol composé de sable ou de gravier sombre ; On peut aussi employer les billes d’argile expansé utilisées dans les pots de fleurs de certaines plantes d’appartement. Il faut faire bouillir ces billes pour qu’elles cessent de flotter et qu’elles coulent sur le fond. Comme sol, on peut aussi mettre de la tourbe ou des feuilles de chêne qui présentent l’avantage d’assombrir l’eau et de l’acidifier. Les poissons pondent volontiers leurs œufs dans les fibres de la tourbe.
Le choix des plantes à placer dans le bac dépend de la quantité de lumière disponible. Si l’aquarium est éclairé par un tube fluo, on peut y mettre des plantes à croissance lente comme les Microsorum, des Anubia, de la mousse de Java ou des Bolbitis. Quelques plantes flottantes comme les Ceratophyllum demersum, le Riccia, les Egeria densa, les Ceratopteris, les lentilles d’eau permettent de lutter un peu contre la prolifération des algues et servent de refuge et de garde manger aux alevins. Si le bac ne reçoit pas de lumière directe mais est seulement éclairé par les lampes de la pièce, la survie des plantes est plus problématique et seules des Anubia, la mousse de Java ou des Microsorum peuvent pousser. Les poissons eux n’ont pas besoin de lumière mais leurs superbes couleurs et leurs reflets métalliques sont mieux mis en valeur par un bon éclairage.
un couple
Les Aphyosemion striatum
sont de petite taille, ils ne dépassent pas 6 cm. Les femelles restent généralement un peu plus petites. Leur corps est cylindrique et leur silhouette assez élancée. On différencie les mâles des femelles au premier coup d’œil : Ils sont brillamment colorés alors qu’elle sont ternes, d’une couleur brun clair ou verdâtre, parsemé de points rouges, avec des nageoires presque transparentes. Au premier coup d’œil les mâles apparaissent rayés de bandes horizontales rouges et vertes. Leur robe présente un fond vert brillant et quatre lignes formées par des points rouges qui recouvrent les flancs sur toute la longueur du poisson. Une cinquième ligne plus courte relie les nageoires pectorales à la nageoire anale. Étymologiquement le terme striatum signifie rayé.
La dorsale est portée en arrière, de couleur verte, bordée de rouge. La caudale est verte, tachetée de points rouges ou de lignes et de 2 bandes jaunes ou orange Les nageoires ventrales sont oranges avec une petite bordure rouge ou orange et les pectorales sont souvent teintées d’orange ou de jaune. L’œil est grand, rond, cerclé de jaune. La bouche est grande car les Killies se nourrissent principalement à la surface, de petites proies sur l’eau.
Mainttenance
Pour les garder dans des bonnes conditions, les Aphyosemion striatum ont besoin d’une eau plutôt acide, assez douce et pas trop chaude.On vise un pH compris entre 6,0 et 7,0 et une dureté de 2 à12 dGH. . Il est généralement nécessaire d’employer de l’eau osmosée ou une eau en bouteille très peu minéralisée pour obtenir ces valeurs, l’eau du robinet est presque toujours trop dure pour des bacs peuplés de Killies. La température normale d’une pièce chauffée est suffisante ; Grâce à un petit éclairage et à la chaleur dégagée par le moteur d’un petit filtre, l’eau atteint sans problèmes 20 ou 22 degrés. Si elle est plus chaude, vers 25 ou 26 degrés, leur métabolisme s’accélère et leur durée de vie est raccourcie. Il ne faut donc pas que la température dépasse 24° C, sous peine de diminuer la longévité des poissons. Maintenus entre 21 et 24 C, leur espérance de vie est de deux au moins alors qu’elle n’est que de douze à quinze mois à 28°. Les grandes chaleurs de l’été peuvent provoquer des hécatombes dans les élevages des amateurs de Killies, malgré la présence de pompe à air favorisant les remous et l’oxygénation de l’eau.
On peut envisager leur maintenance en bac communautaire à condition que l’aquarium soit peuplé de poissons calmes, de petite taille et pas agressifs. Mais les Aphyosemion striatum risquent d’être stressés et dominés et de rester plutôt ternes et peu visibles. On peut aussi envisager un bac d’une centaine de litres, peuplé de divers Killies. Il faut alors éviter d’y mettre des espèces proches qui risqueraient de s’hybrider. Il existe assez de souches de Killies colorés et intéressants sans avoir besoin de créer des hybrides. Il est généralement très difficile de différencier les femelles qui se ressemblent beaucoup et certains magasins ont tendance à tout mélanger… On peut par exemple faire cohabiter des A striatum avec des A.australe ou des A. bitaeniatum ou même avec des Epiplatys dageti qui restent près de la surface.
Alimentation
Ce sont des poissons gourmands qui apprécient particulièrement la nourriture vivante ou congelée. On leur distribue des vers de vase, des larves de moustique, des petits gammares, des daphnies. Certains apprennent à manger des paillettes ou des granulés. Mais si on veut obtenir des jeunes la nourriture vivante est indispensable pour mettre les parents en condition et les inciter à pondre.
Reproduction
Les paramètres de l’eau sont importants pour la réussite des reproductions : Il est nécessaire d’utiliser de l’eau faiblement minéralisée et d’avoir un pH légèrement acide.
Ils pondent dans leur bac, quelques œufs tous les jours. Certaines femelles pondent plus d’une une cinquantaine d’œufs par semaine et ceci régulièrement pendant plus de 3 mois… Les œufs sont fixés dans les plantes flottantes, par des filaments adhésifs, sur les fibres de la tourbe ou sur un « mop » fabriqué en laine synthétique. On peut choisir de retirer les œufs régulièrement ou de les laisser dans le bac où ils ont été pondus et d’en ôter les adultes. Tous les 3-4 jours on retire le mop du bac, on enlève les oeufs avec les doigts ou avec une petite pince et on les place 2 bonnes semaines dans un petit peu d’eau à température ambiante. Si on laisse les œufs dans le bac où vivent d’autres poissons, ils risquent fort d’être mangé. Contrairement à d’autres Killies, si les parents striatum sont bien nourris, ils ne dévorent généralement pas leurs œufs ni leurs alevins. On peut très bien les laisser éclore et grandir dans le bac de ponte à condition que celui-ci soit densément planté pour que les jeunes puissent facilement se nourrir d’infusoires ou de petites proies.
une femelle
Si on retire les œufs du bac d’ensemble, on peut ajouter 3-4 gouttes de bleu de Méthylène pour limiter les risques d’attaque fongique.
Après 3 semaines, les œufs commencent à éclore, On peut alors petit à petit remonter le niveau de l’eau du petit bac et y placer de nombreuses plantes flottantes ou mieux encore du Riccia et de la mousse de Java qui contiennent une grande quantité d’infusoires dont se nourrissent les alevins. Très vite ceux-ci se tiennent juste sous la surface de l’eau parmi les plantes flottantes. On leur distribue 3 à 5 fois par jour des nauplies d’artémia, des micro vers ou des anguilles au vinaigre ce qui favorise leur croissance. Ils n’acceptent pas les poudres ni les paillettes. Ils grandissent assez lentement, atteignant un bon centimètre après 4-5 semaines. On peut différencier les sexes vers 6-8 mois et ils commencent à se reproduire après un an.
MOP
Pour fabriquer un mop il suffit de prendre un peloton de laine acrylique assez épaisse et de l’entourer autour de sa main ou autour d’un livre puis de fixer un bouchon en liège ou un morceau de sagex dans la boucle et de couper les brins qui pendent. On peut aussi faire comme lors de la fabrication des pompons, avec un anneau en carton entouré de laine puis coupé. On fait bouillir le mop 5 minutes avant de le placer dans le bac. Il suffit de prévoir une assez grande longueur pour que le nœud avec le bouchon soit à la surface et que les brins pendent jusqu’au sol. Certains poissons pondent tout près de la surface, d’autres dans le bas de la laine.
On choisit souvent de la laine de couleur sombre pour mieux voir les œufs qui sont bien visibles comme des petites billes transparentes sur du noir ou une teinte comme le bleu ou sur du vert foncé, mais il est possible d’employer n’importe quelle couleur ça n’a pas d’importance pour le poisson. .
merci Notho pour les photos
AQUARIUM
En verre ou plastique de 15 à 20 litres pour un couple ou un trio (1 mâle et 2 femelles) doté d’un couvercle bien fermé.
EAU
Une eau douce et acide, pH entre 6 et 7, dureté inférieure à 10dTH.
ÉQUIPEMENT
Un petit filtre intérieur ou simplement des changements d’eau fréquent et réguliers :Un combiné de chauffage n’est pas nécessaire si on installe l’aquarium dans une pièce normalement chauffée.
ÉCLAIRAGE
Si on veut un aquarium bien planté, il faut compter 1 Watt pour 2 litres d’eau et donc prévoir un éclairage de 10 W environ assuré par une petite lampe ou un tube fluo. Le choix de l’éclairage dépend du type de plantation que l’on envisage, on peut très bien se passer de lumière si on ne met que des plantes faciles comme des Anubia ou du Microsorum.
ENTRETIEN
Si on a mis un filtre, il faut prévoir le nettoyage des masses filtrantes toutes les 4 semaines environ, et un changement d’eau hebdomadaire d’environ 10% du volume du bac, en siphonnant bien les déchets déposés sur le sol. S’il n’y a pas de système de filtration, les changements d’eau doivent être plus fréquents et plus importants, de l’ordre de 20 à 30 % tous les 5 jours. Nettoyage hebdomadaire des algues sur les vitres et taille des plantes.
DECOR.
Un sol de sable sombre ou simplement composé de tourbe fibreuse, quelques tiges de plantes flottantes ou des pieds de Microsorum fixés sur une racine.
ALIMENTATION
Pour favoriser les reproductions il faut de la nourriture vivante ou congelée distribuée deux fois par jour et au moins un jour de jeûne chaque semaine pour éviter l’embonpoint. Ces poissons ont toujours faim et l’on a tendance à trop les nourrir !
POPULATION
Idéalement il ne faut pas les mélanger à d’autres poissons, ils vivent mieux en bac spécifique.
Ce texte a paru en mars 2004 dans le numéro 210 d’Aquarium Magazine©Véronique Ivanov