Sturisoma aureum
Sturisoma aureum (Steindachner 1900)
Famille: Loricariidae / Sous famille : Loricariinae / Origine: Amérique du Sud
Taille Adulte: 20 à 30 centimètres
Ces poissons attirent le regard par leur forme surprenante : Tout en longueur et cuirassés, avec un corps mince et allongé. Ces Loricariidés sont des hôtes paisibles et attrayants pour un grand bac.
À l’état sauvage, ils vivent dans les rivières rapides à forte concentration en oxygène. L’eau y est relativement douce avec un pH légèrement acide à neutre.
Ce sont des poissons adaptables qui ont une large tolérance quant aux paramètres de l’eau, pourvu qu’elle soit bien brassée et oxygénée. Pour les héberger il faut prévoir un bac de bonne taille car à l’âge adulte ils mesurent de 25 à 30 centimètres. Peu actifs, passant de longues heures immobiles, collés sur une vitre ou sur une souche, il leur faut tout de même un certain volume d’eau. Ce ne sont pas de grands nageurs, mais ils sont capables de se déplacer rapidement en cas de besoin, par bonds vigoureux et rapides, et en partant très vite droit devant eux. La plupart du temps, ils avancent simplement le long d’une vitre ou d’un support par un mouvement buccal caractéristique. Sans être vraiment territoriaux ou agressifs, ils se tiennent généralement toujours au même endroit et si nécessaire défendent cette position à grands coups de queue. Ce sont des poissons paisibles qu’on voit souvent posés sur une ardoise, ou collés verticalement contre les vitres du bac. L’agencement de l’aquarium doit comporter des larges pierres plates et du bois, ainsi qu’un éclairage modéré ou tamisé
Leur corps est mince et allongé, recouvert d’une cuirasse de plaques osseuses, ils ne portent pas d’écailles. La bouche, en forme de ventouse, est située sous la tête. Elle est pourvue de lèvres épaisses et charnues. Elle permet aux poissons à la fois de se fixer et de râper les algues dans lesquelles ils trouvent leur nourriture. La respiration se fait donc surtout par les ouvertures brachiales, à une cadence assez rapide. La bouche porte des dents qui leur permettent de râper le bois et les algues. Les Loricariidés sont sensibles aux vibrations de l’eau, qu’ils peuvent aisément capter.
S.Aureum reconnaissable à son ventre moucheté
On les observe facilement pendant la journée, ce sont des poissons diurnes et peu timides, qui ne se cachent pas si le bac n’est pas trop éclairé. Ils apprécient les zones plus sombres où ils passent des heures, collés verticalement sur les larges feuilles de certaines plantes, les Echinodorus par exemple, ou contre une racine. Contrairement à bien d’autres Loricariidés, il est inutile de leur fournir des cachettes, ils ne recherchent pas les grottes ni les petites anfractuosités.
Les Sturisoma sont très sensibles à la pollution, plus particulièrement aux nitrates. Pour prévenir les problèmes, il est nécessaire de siphonner régulièrement le sol de l’aquarium et d’entretenir régulièrement le filtre. Si les paramètres de l’eau deviennent mauvais on observe alors que les poissons se rapprochent de la surface et recherchent la zone la plus brassée de l’aquarium, généralement juste à la sortie du filtre. Selon la configuration et le décor du bac, il peut être nécessaire de placer une pompe de brassage pour créer un bon courant.
Leur couleur de base est brun beige, plus ou moins foncé, parcourue chaque côté d’une bande noire qui va du museau jusqu’à la queue, en recouvrant les yeux. Le ventre est plus clair. Un poisson adulte mesure un peu moins de 30 cm, le corps fait environ 10 cm, pour un diamètre de 3 à 4 cm, le pédoncule caudal autant et la queue prolongée par les filaments fait 6 à 8 cm.
Leurs nageoires sont plus sombres, la dorsale est parfois noire et bien développée : elle est très grande, haute et plus recourbée chez les mâles que chez les femelles. Elle mesure jusqu’à 5 cm de hauteur.
Les premiers rayons des pectorales ne sont pas prolongés par des filaments, contrairement au Sturisoma festivum, qui lui présente ces filaments, surtout observés sur les poissons sauvages.
Quand ils atteignent une taille de 12-15 centimètres, ou à partir d’un an environ, on différencie les mâles des femelles par la présence d’odontodes, sorte de barbe, de poils que portent les mâles adultes de part et d’autre de la tête, tout autour de la bouche et parfois aussi sur les joues. Les plaques osseuses qui recouvrent leur corps sont articulées et leur permettent une grande souplesse.Ils parviennent à se plier en forme de U, ramenant la queue quasiment au même niveau que la tête…Quand ils sont installés sur un comprimé de spiruline et qu’un autre poisson s’en approche, ils s’agitent, remuent l’eau et battent violemment de la queue.
Les poissons adultes sont faciles à nourrir : ils broutent les algues et mangent les petites bestioles qui s’y cachent. On peut aussi leur distribuer du concombre, de la courgette, des feuilles de laitue et d’épinards blanchies ; les petits pois sont très appréciés, ainsi que les pastilles à base de spiruline. Ils mangent aussi les vers de vase et les préparations à base de coeur de boeuf, ainsi que certains flocons et granulés du commerce. La présence de bois dans leur aquarium est essentielle, ils ont vraiment besoin de cellulose, comme bien d’autres Loricariidés La cellulose végétale est prise comme nourriture. Si l’on met un bois assez tendre dans leur bac, on peut voir les marques qu’ils laissent en le râpant. Ils usent véritablement les souches. Il faut donc prévoir des racines en bois tendre ou des souches autres que le bois de Mopani qui est très (trop) dur… La consommation de fibres ligneuses fait qu’ils produisent aussi beaucoup d’excréments.
Comme beaucoup de Loricariidés, et bien d’autres poissons, ils apprécient une eau claire et très bien oxygénée. On peut créer un tel milieu en installant un fort brassage ou en favorisant la pousse des plantes qui vont produire de l’oxygène et saturer l’eau.
Des changements d’eau réguliers et fréquents permettent aussi de garder des bonnes valeurs. Si l’on néglige l’entretien, on voit alors les poissons se tenir dans le rejet du filtre et dans la partie haute du bac, tout proches de la surface.
Les Sturisoma ne doivent pas être tenus en compagnie de poissons trop agités ou joueurs qui mordilleraient leurs nageoires et pinceraient leurs longs filaments. La présence de Barbus de Sumatra ou de Botia macracantha est déconseillée. Ces poissons sont d’ailleurs originaires d’Asie du sud-est et n’ont rien à faire dans un bac peuplé de Sturisoma et d’espèces amazoniennes
Les Sturisoma n’abîment ni ne déterrent les plantes mais restent volontiers couchés sur les feuilles. Il faut donc prévoir une végétation adaptée à leurs besoins : des Echinodorus avec de larges feuilles, des Anubia et des Vallisneria gigantea.
La plupart des livres présentent diverses espèces de Sturisoma, mais il règne une certaine confusion dans la nomenclature. Les magasins vendent sous le nom de S.aureum ou S.panamense toutes les variétés irrégulièrement disponibles. Il n’est malheureusement pas rare de trouver sur le Web ou dans les livres, un texte qui parle des S.aureum et qui est illustré par des photos de Rineloricaria ou de Farlowella par exemple… !! La confusion règne entre les Pseudosturisomatichtis qui restent plus petits (15 cm environ) et les S. aureum par exemple. Leur patron de coloration est très proche, et quand ils sont jeunes, on les différencie entre autres, en observant leur ventre : les S. aureum présentent un ventre tacheté alors que les Pseudosturisomatichtis ont la face ventrale grise ou beige clair. La forme de leur tête présente aussi de légères différences. Le S. aureum a le nez plus long et plus pointu. Ils sont plus faciles à reconnaître si l’on peut comparer directement les 2 poissons. À l’intérieur du groupe des Sturisoma-panemense, il est fort possible que des poissons non décrits soient récemment importés, en provenance de rivières de Colombie surtout, qui sont diverses formes de la même espèce.
On trouve ces divers poissons dans une bonne partie du bassin amazonien et en Amérique centrale jusqu’au Panama. L’isolation géographique de certains cours d’eau rapides a favorisé l’apparition de populations locales.
Il est d’ailleurs possible que S. panamense et S. aureum soient des poissons de la même espèce mais qui portent des livrées différentes selon leur lieu de pêche.
Reproduction
Contrairement à bon nombre de Loricariidés, les Sturisoma se reproduisent assez aisément en aquarium, même en bac communautaire. Les pontes sont faciles à obtenir, mais l’élevage des jeunes peut présenter des problèmes, car ils sont difficiles à nourrir !
Les Loricarudés ont une saison de ponte comme les Corydoras, ils pondent en hiver et jusqu’au début de l’été. Leurs premières pontes débutent à l’âge d’un an et demi, parfois avant si, les poissons sont bien nourris. Quand un couple s’est formé, il peut pondre quasiment chaque semaine pendant 3 ou 4 mois puis s’arrêter complètement.
Le frai dure quelques heures, pendant la nuit, ou très tôt le matin et est souvent interrompu. Il arrive que le couple remue violemment, les partenaires battant l’eau de leur queue dans de grands mouvements brusques,mais après quelques pontes, c’est plus calme et moins agité . Lors des premières pontes il y a généralement 30 à 40 oeufs. Certaines publications annoncent des pontes d’une centaine d’oeufs mais personnellement, je n’en ai jamais vus autant
sous un oeil intéressé
Ils pondent généralement sur une vitre de l’aquarium, à l’endroit où frappe le rejet du filtre, en plein courant. Pendant le frai, la femelle expulse quelques oeufs, 3 ou 4 qui sont immédiatement fécondés par un passage du mâle. Ils sont ronds, assez gros puisqu’ils font près de 2mm, collants et transparents, parfois légèrement dorés. Ils sont durs, comme les oeufs des Corydoras et on peut les décoller doucement de la vitre sans risquer de les abîmer. Il est ainsi possible de retirer une partie des oeufs pour faire grandir les jeunes dans un petit bac, plus adapté pour leur nourrissage au cours des premières semaines de vie. L’amas d’oeufs mesure une dizaine de centimètres de haut et 3-4 cm de largeur.
surveillance et ventilation des oeufs
Si l’on n’intervient pas, le mâle reste tout près des oeufs, les éventant et les protégeant : il reste là plusieurs jours sans bouger et sans manger. La femelle, elle ne s’intéresse pas du tout à sa ponte et se fait même pourchasser si elle fait mine de s’en mêler. Quand on s’approche pour observer le bac, le mâle glisse doucement le long de la vitre pour recouvrir ses œufs et les protéger, mais sinon il reste simplement à côté et les évente par instants. En regardant attentivement, à partir du 3è jour, on voit les alevins se former à l’intérieur de l’oeuf.
Ils deviennent de plus en plus sombres et noircissent au fur et à mesure qu’ils grossissent ; à une température de 26-27 degrés l’éclosion à lieu après 5 jours. On compte 140 heures d’incubation. Si la température n’est que de 25ºC, on doit attendre 8 jours pour qu’ils éclosent. Parfois le mâle mâchouille les oeufs pour faciliter l’éclosion, mais ce n’est pas systématique. À leur naissance, les alevins sont noirs et mesurent presque un centimètre. Il leur faut 2 jours pour résorber leur sac vitellin avant de commencer à nager et à chercher à s’alimenter.
C’est à ce moment que les problèmes peuvent se poser… les jeunes sont difficiles à nourrir : ils n’acceptent pas de nauplies d’artémia, ni de micro vers. Ils s’enfuient même si on en place près d’eux ! Visiblement les mouvements de ces petites bêtes leur font peur… Il est fréquent de perdre plus de la moitié des alevins suite à des problèmes de malnutrition.
L’idéal serait de leur proposer des pierres couvertes d’algues vertes filamenteuses qui portent aussi toute une micro faune, paramécies et infusoires. Cette méthode est contraignante et l’on peut tenter de mettre dans le bac une peau de banane séchée, qui produit des infusoires et contient de la cellulose immédiatement digérable. Le plus simple est de gratter proprement l’intérieur de la peau pour retirer toute la chair et de la passer quelques secondes au four à micro-ondes. Il doit être certainement possible d’employer du riz paddy ou de laisser macérer une feuille d’épinards pour qu’elle se décompose un peu avant de la leur donner….
On peut aussi leur offrir des tranches de concombre ou de courgette, des haricots verts cuit, une feuille de laitue bouillie, certains s’y intéressent, d’autres pas du tout ! Il est parfois plus simple et pratique de placer les jeunes dans un petit bac contenant une bonne quantité du Riccia ou de la Mousse de Java pour leur permettre de s’alimenter pendant la première semaine, en consommant les infusoires. J’ai fait de bonnes expériences en introduisant simplement du Riccia dans le bac de croissance et en rajoutant une bonne poigné de plantes tous les 2-3 jours.
La présence d’organismes vivants et de protéines animales, en plus d’une importante part végétale, semble essentielle pour leur développement. Ils sont fragiles car ils n’ont pas de réserves. Il est possible que leur intestin ne soit pas encore suffisamment développé et qu’ils aient du mal à digérer la nourriture, sauf si elle commence à être décomposée par des bactéries. Certains alevins piégés dans le filtre à décantation grandissent vite et bien en s’alimentant simplement des déchets à demi décomposés qu’ils trouvent sur les mousses bleues contenues dans le filtre…
Ils s’intéressent aussi aux cachets de fond, surtout à ceux qui contiennent une grande part de spiruline. Quelques éleveurs emploient de la poudre de spiruline, mélangée à de l’agar-agar, dans une proportion de 2/3 pour 1/3.
Les alevins grandissent à un rythme inégal. Certains atteignent une taille de 3 cm à l’âge de 10 semaines, alors que d’autres ne font que la moitié.Les jeunes Strurisoma semblent actifs principalement pendant la nuit, et changent de couleur : ils sont plus clairs pendant la nuit, beige et brun alors qu’ils sont plutôt sombres pendant la journée.
Dès qu’ils ont atteint 6 centimètres, ils peuvent poursuivre leur croissance dans un plus grand bac.
Lors des pontes de mon couple, j’ai prélevé les trois quart des œufs juste avant l’éclosion pour les placer dans un pondoir en plastique, installé dans le bac des adultes et « décoré » d’un petit morceau de bois et d’une tige de plante flottante ou d’une poignée de mousse de java ou de Riccia. Ce petit pondoir est plus pratique pour pouvoir nourrir les alevins. Si je laisse les jeunes en compagnie des parents il n’y a pas de problèmes de prédation mais je constate une mortalité importante. Les alevins ont besoin de trouver la nourriture juste sous leur nez, ils semblent peu actifs et ne se déplacent pas beaucoup pendant les premiers jours. En plus d’une peau de banane séchée, j’utilise des comprimés de spiruline, et des pastilles de fond, ainsi que des petits morceaux de concombre, courgette et pomme de terre, presque décomposés. J’y change l’eau 2 fois par jour et chaque soir, j’aspire soigneusement le fond avec un tuyau à air prolongé d’une paille. L’hygiène doit être parfaite et malheureusement dans ces petits nichoirs, il n’y a aucun courant ni renouvellement de l’eau. Quand les alevins ont atteint 3-4 centimètres et savent se nourrir correctement, ils rejoignent un bac de 50 litres et sont ensuite transférés dans un bac de 120 litres puis de 250 litres selon leur taille, en compagnie de jeunes Discus et d’Ancistrus. Dans ces bacs de grossissement, l’eau a un pH proche de 7 et est moyennement dure, sa conductivité est de 350 µS /cm, et la température est de 28 degrés.
Ils partagent leur bac avec des jeunes Discus de 4-5 cm
Ils râpent une racine
Sur ces photos les plus grands mesurent environ 6 cm
et sont âgés de plus de 4 mois
Ils apprécient les patates
Ils broutent les algues
Le genre Sturisoma, qui regroupe environ 15 espèces d’après Isbrücker, a été établi par Swainson en 1838 et appartient à la sous-famille des Loricariinés. Ils vivent dans le Nord de l’Amérique du Sud et au Panama et sont encore peu documentés. Les plus couramment représentés sont les S. aureum et S.barbatum. Actuellement il y a très peu d’exportation de S. panamense.
Sturisoma aureum (Steindachner, 1900)
Sturisoma barbatum (Kner, 1853)
Sturisoma brevirostrum
Sturisoma dariense (Meek et Hildebrand, 1913)
Sturisoma festivum
Sturisoma frenatum (Boulenger, 1902)
Sturisoma guentheri (Regan, 1904)
Sturisoma kneri (De Felippi, 1940)
Sturisoma lyra (Regan, 1904)
Sturisoma monopelte
Sturisoma nigrirostrum
Sturisoma panamense
Sturisoma robustum (Regan, 1904)
Sturisoma rostratum (Spix, 1829)
Sturisoma tenuirostre (Steindachner, 1910)
Une partie de cet article a paru dans le numéro 200 d’Aquarium-Magazine
©Véronique Ivanov