Rineloricaria lanceolata 

Rineloricaria lanceolata 

Nom français : Loricaria lancéolé
Synonymes : Loricaria lanceolata , Loricariichthys lanceolatus
Décrit par Gunther en 1868 et importé pour la première fois à Berlin en 1925.

Origine: Paraguay, Bolivie, Colombie, Equateur, rio Negro, rio Paraguay

Drôles de poissons minces et allongés, qui mesurent 8-12 cm, paisibles et omnivores. Pacifiques ils vivent en couple et sont actifs surtout le soir et la nuit. Ce sont des poissons pour un bac tempéré, qui apprécient une eau plutôt fraîche (proche de 24 degrés) et qui vivent beaucoup moins longtemps dans un bac dont la température dépasse 26 degrés. Ils n’auraient pas leur place dans un aquarium peuplé de Discus par exemple, puisque l’eau d’un tel aquarium doit être entre 28 et 30 degrés. Dans de bonnes conditions, ils peuvent vivre plus de 10 ans, mais si l’eau est trop chaude leur espérance de vie ne dépasse pas 3-4 ans.

Il existe 2 patrons de coloration chez les Rineloricaria : les Rineloricaria sp.rouge et les Rineloricaria lanceolata tous les deux se croisent très facilement. Les Rineloricaria lanceolata sp.rouge, sont aussi vendus sous la dénomination : L10a
Il semble que la plupart des R.sp.rouge vendus dans les commerces aquariophiles européens soient issus d’une mutation naturelle, qu’on trouve irrégulièrement à l’état sauvage, mais qui a été sélectionnée et fixée par les éleveurs allemands. Les Rineloricaria sp. rouge sont brun-roux ou carrément rouge-orange.
Les R . lanceolata eux sont tachetés : sur un fond brun clair apparaissent de grandes taches noires irrégulières et réparties sur tout le corps et qui recouvrent une partie des nageoires et de la dorsale. Il n’y a pas de différence de coloration entre les 2 sexes. Les mâles adultes portent des soies rigides sur la tête et sur le bord des nageoires pectorales, baptisées odontodes

Maintenance

Ce sont des poissons calmes, de taille raisonnable (les adultes ne dépassent pas une douzaine de centimètres) qui ne montrent aucune agressivité et qu’il est facile de garder en paire ou en couple. 2 poissons du même sexe s’entendent généralement très bien. Ils sont peu actifs et passent la plupart du temps collés contre une feuille, contre les vitres ou sur divers éléments lisses du décor, grâce à leur bouche en forme de ventouse, typique des poissons de cette famille. Il arrive aussi qu’ils restent sur le sable, fréquemment sous l’ombre d’une plante.
Ils fuient la lumière forte et n’apprécient pas un aquarium trop éclairé : il faut donc prévoir des zones ombragées par des tiges de plantes qui se recourbent à la surface ou couverture de plantes flottantes comme les Pistia.

Il est inutile de leur construire des grottes,car ils sont rarement cachés, sauf au moment de la reproduction, où ils s’installent volontiers dans un tuyau ou un tube à demi enterré. On peut alors leur proposer comme support de ponte, des petits tubes en céramiques de 15 à 20 cm, des décors en terre cuite à demi enfouis ou des troncs creux et des morceaux de bambou.

Un bac d’un mètre de longueur suffit pour installer 2 ou 3 Rineloricaria à condition que l’aquarium ne soit pas peuplé d’espèces agressives ou trop agitées. Les Barbus de Sumatra (Puntius tetrazona) ou les Danio rerio par exemple sont à proscrire car ils ne tiennent pas en place et chicanent volontiers les autres poisons. Les Rineloricaria sont relativement timides et vivront bien mieux en compagnies d’autres poissons tranquilles. Ils ne sont absolument pas territoriaux et il est tout à fait possible de les garder en petit groupe. Ce sont des poissons faciles, qui s’adaptent assez facilement aux paramètres de l’eau et qui sont aisés à nourrir.

La seule contrainte est de leur proposer une eau tout à fait propre, dépourvue de nitrites et presque sans nitrates. Une panne de filtre, suivie d’une poussée de nitrites peut les tuer tous en une journée, alors que les autres poissons du bac sont à peine indisposés. Il faut prévoir un bon brassage du bac, avec une pompe supplémentaire si nécessaire, tout en orientant le rejet du filtre vers la surface afin qu’il crée des remous qui oxygènent l’eau. Si la qualité de l’eau se détériore et surtout si l’oxygénation diminue, on voit très vite les Rineloricaria se placer dans le rejet du filtre, le plus près possible de la surface et dans les zones les plus brassées de l’aquarium.…

Nourriture.
Ils sont omnivores et très faciles à nourrir ; Quand ils broutent une feuille couverte d’algues, ils se nourrissent plutôt des petits animalcules qui s’y trouvent. Ils apprécient les paillettes et les flocons ainsi que les granulés qui coulent sur le fond. Ils affichent une prédilection marquée pour les vers de vase et les larves de moustiques ainsi que toutes les petites proies comme des artémias ou des daphnies. Les apports végétaux, sous la forme d’une feuille de laitue ou d’épinards sont essentiels.

Les Rineloricaria se déplacent dans tout l’aquarium, mais se nourrissent de ce qu’ils trouvent au sol et ne montent pas manger en surface ni en pleine eau. Il faut donc s’assurer qu’une quantité suffisante d’aliments leur parvient, et que les poissons plus vifs de la surface ne mangent pas tout. On doit leur distribuer des aliments qui coulent et pas seulement des paillettes qui flottent à la surface. Ils mangent volontiers de la nourriture vivante ou congelée, des daphnies, des tubifex, des vers rouges, des artémiaset sont très intéressés par les matières végétales : le concombre et la courgette, les brocolis, le chou-fleur, la pomme de terre, les poivrons…

Reproduction

Pour espérer des reproductions il faut introduire plusieurs poissons et attendre la formation d’un couple : On a plus de succès s’ils ont pu se choisir que si l’on isole arbitrairement une femelle et un mâle. Mais des reproductions sont tout de même fréquentes avec un couple assemblé au hasard. L’aquarium de reproduction n’a pas besoin d’être très grand, une cuve d’une centaine de litres fait l’affaire. Comme bien d’autres Loricariidés, ils ont une saison de reproduction qui s’étend de l’automne à la fin de l’hiver.

Quand les poissons sont jeunes, ils sont difficiles à sexer, mais une fois matures, on reconnaît les mâles en notant la présence d’odontodes sur leur tête et en observant leurs nageoires pectorales : Chez les mâles, le premier rayon est plus épais et comme couvert de barbe ou de petits piquants. Ceci se retrouve chez d’autres espèces de Rineloricaria et de Loricariidés, et n’apparaît que chez les sujets adultes.

Des reproductions peuvent avoir lieu en bac d’ensemble, mais il est préférable d’isoler un couple ou un trio, 2 femelles bien rondes et un mâle dans un bac spécifique. Le mâle fraie successivement avec les 2 femelles et les éclosions des œufs s’échelonnent. Après la ponte on retire les femelles qui ne participent pas à la surveillance. L’utilisation d’eau très douce, eau osmosée ou eau de pluie propre et filtrée pour abaisser la dureté, peut aussi déclencher une ponte. L’idéal est de parvenir à un pH neutre, juste en dessous de 7, associé à une conductivité proche de 100 µScm2 ; mais tant qu’on ne s’éloigne pas trop de ces valeurs, et tant que l’eau est douce, (pas plus de 12 dKH ) les poissons peuvent se reproduire. En ajoutant à l’eau un concentré de tourbe on obtient une eau noire et acide.

Très rapidement après un brutal changement d’eau, le mâle commence à nettoyer énergiquement un tuyau à demi enterré, un tronc creux, une amphore en terre cuite…et un peu plus tard la femelle le rejoint ; ils entrent dans le tube pour pondre. Le tuyau en PVC mesure environ 4 cm de diamètre et une quinzaine de centimètres de longueur. Il faut leur proposer plusieurs tuyaux, de différents diamètres. Si le tube est trop large, il semble que les poissons ne s’y sentent pas en sécurité pour pondre, s’il est trop étroit, les œufs risquent d’être expulsés par les grands coups de queue des parents au moment de la ponte.
Le mâle reste à l’intérieur mais la femelle en ressort quelques fois avant d’y retourner…les poissons sont très agités, d’après les violents mouvements de leurs queues qu’on peut apercevoir. Une fois la ponte terminée la femelle s’en désintéresse complètement et le mâle reste au-dessus montant la garde et ventilant les oeufs.

Les mâles R.sp.rouge sont de bons pères, attentifs et prenant soin des œufs alors que fréquemment lors des reproductions de R.lanceolata, les 2 parents se désintéressent de leurs œufs une fois la ponte terminée. On voit d’ailleurs bon nombre d’éleveurs mettre ensemble une femelle R.lanceolata et un mâle R.sp.rouge pour que la ponte profite des soins assurés par le mâle. On obtient alors des jeunes qui sont marbrés de rouges et de brun, mélange des patrons de coloration des 2 parents.


Le nombre d’œufs d’une femelle R.lanceolata adulte est 2 ou 3 fois plus important que lors de la ponte d’une R.sp.rouge , peut-être pour compenser les morts dus au manque de soin des parents ? Dans un tel cas, doit-on parler de croisement ou d’hybridation ? Je n’en sais trop rien, le classement taxonomique de ces poissons étant encore peu précis.

Il n’est pas nécessaire de nourrir le mâle, qui ne s’alimente pas pendant une dizaine de jours jusqu’à l’éclosion. Parfois il peut manger un peu, pendant la nuit si on lui distribue une nourriture très tentante… mais avec un risque accru de pollution du bac.

Pour un couple de R.sp.rouge lors des premières tentatives, 30 à 40 œufs sont pondus puis on assiste ensuite à des pontes de plus de 80 œufs.L’accouplement peut être assez violent, il arrive que la femelle soit blessée ou tout au moins un peu sonnée par le mâle qui la chasse, une fois la ponte terminée. Les œufs sont légèrement colorés, et ils sont groupés par 4 ou 5. Selon la température du bac, ils éclosent après 4-5 jours, mais il faut attendre encore plus d’une semaine pour que les larves commencent à sortir du tuyau. Dès que leur sac vitellin, qui est coloré de vert… est complètement résorbé, on peut isoler les jeunes dans un petit bac de 10-20L qui flotte dans l’aquarium pour les nourrir plus facilement. Il faut impérativement maintenir une hygiène irréprochable et changer une partie de l’eau chaque soir en nettoyant bien la vitre du fond. On doit leur donner à manger plusieurs fois par jour, et aspirer soigneusement la nourriture et les déchets tombés au fond du bac. La mortalité des jeunes est assez importante, il arrive qu’on perde plus de la moitié des alevins. En cas de malnutrition, on voit se développer très lentement des poissons qui présentent une colonne vertébrale déformée.

Pour nourrir les jeunes poissons, les premiers jours j’emploie des infusoires,et des rotifères puis rapidement les nauplies d’artémia et les cyclops conviennent très bien, associés à des distribution de comprimés de fond, de spiruline et de divers légumes. Au début, les alevins ont peu de réflexes de chasse et il faut vraiment qu’ils soient entourés de nauplies pour se nourrir correctement. Si la nourriture est suffisante, ils grandissent et s’arrondissent pour mesurer 3 centimètres à l’âge de 2 mois. Il ne faut les mettre en compagnie d’autres poissons en bac d’ensemble que quand ils ont atteint la taille de 5-6 cm, sinon ils risquent de souffrir de la concurrence alimentaire et de mal se nourrir.

forme marbrée

Les Rineloricaria apprécient une eau propre, sans composés organiques, sans ammoniaque, nitrate ou nitrite. Les changements d’eau sont essentiels pour les maintenir en bonne santé. Renouveler 20 % du volume chaque semaine est un bon rythme car ils apprécient l’eau neuve et bien oxygénée.

La filtration doit être importante, avec un débit de deux à trois fois le volume du bac par heure, assortie d’un bon brassage en surface pour oxygéner l’eau, mais sans créer un courant trop fort. On peut installer le tuyau de rejet du filtre juste sous la surface pour générer des remous qui favorisent les échanges gazeux, tout en évitant le bruit de cascade de l’eau qui retombe ! Si le brassage est trop fort, le Co2 dissous dans l’eau et nécessaire pour la bonne santé des plantes, va s’échapper trop rapidement. L’eau de conduite convient bien pour autant que le chlore soit éliminé par un bon brassage et que la dureté ne dépasse pas 12 TH. Le pH à obtenir se situe au environ de 7pH. Le renouvellement régulier d’une partie de l’eau reste le meilleur moyen de prévenir les problèmes d’hygiène et la dégradation du milieu. Il faut mesurer régulièrement les nitrates (et pas seulement surveiller le taux de nitrites) et veiller au bon équilibre de l’aquarium.
La température idéale se situe entre 24 et 26 degrés. Le bac peut être décoré de branches et de pierres non calcaires, on peut y placer quelques tuyaux ou bambous partiellement enterrés ou posés sur le sable. Les plantes sont importantes, elles participent à l’équilibre du bac en absorbant les nitrates et en produisent de l’oxygène. Selon la taille de l’aquarium on peut planter des Acorus, Aponogeton, Cabomba, Cryptocoryne, Eichhornia, Elodea, Heteranthera, Hygrophila,Vallisneria… et bien d’autres plantes qui s’adaptent sans difficulté à une eau neutre et pas trop chaude.

Population suggérée :.
Les rivières et ruisseaux sud américains sont peuplés par grand nombre de poissons d’aquarium bien connus. Un aquarium de type « amazonien » de 200 litres par exemple, peut abriter une population selon ce modèle :
5 ou 6 Rineloricaria
un groupe de 6 Corydoras qui restent sur le fond,
un couple de Mikrogeophagus ramirezi, ou d’autres petits cichlidés amazoniens
un banc d’une douzaine de Paracheirodon,
un autre banc de petits Tetras,

Cer artice a été écrit pour le numéro 205 d’Aquarium Magazine, paru en septembre 2003

© Veronique Ivanov