Anomalochromis thomasi

Anomalochromis thomasi

Après s’être appelé Pelmatochromis thomasi, ce joli petit Cichlidé fait aujourd’hui partie d’un genre créé pour lui tout seul en 1985: Anomalochromis. Importés depuis 1966, on les trouve assez régulièrement dans les magasins, mais malgré ses nombreuses qualités, ce n’est pas un poisson « à la mode ».

Poissons fluviatiles qu’on peut installer dans un bac d’ensemble, ils vivent dans les rivières qui coulent dans les forêts en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia. L’eau qui circule sous les arbres est plutôt acide et douce, la température proche de 25C. Dans certains cours d’eau, l’eau est sombre, colorée par les tanins des feuilles et branches tombes qui s’y décomposent.
Ils apprécient un bac bien planté avec des grandes tiges qui créent des zones d’ombre, décoré de bois et de grottes construites avec des pierres non calcaires. L’utilisation de noix de coco soigneusement vidées et lavées, puis coupées en 2 morceaux de taille inégale et un peu enfoncées dans le sol, permet de créer de superbes lieux de ponte, utilisés aussi par bien d’autres poissons comme refuge
Ils ne creusent pas le sol, ne retournent pas le décor et n’arrachent pas les plantes.

De petite taille, 8 -9 cm au maximum, la femelle restant plus petite, ils sont plutôt timides. Les différences entre les sexes sont peu visibles, les mâles arborant simplement des nageoires dorsale et anale plus longues. Les femelles ont fréquemment le ventre plus rond et présentent des taches plus noires et des couleurs plus contrastées. C’est surtout en observant leur comportement qu’il est possible de différencier les sexes, par leur attitude entre eux si on les garde en petit groupe ou face aux autres poissons du bac. Ce sont les mâles qui se chargent de la défense du territoire et qui s’affrontent, alors que les femelles s’occupent de la protection rapprochée des jeunes. Les rôles peuvent d’ailleurs très bien être interchangeables dans certains couples ! Les combats occasionnent rarement de vraies blessures : c’est plutôt une suite ritualisée de postures d’intimidation. Si le bac est suffisamment grand, on peut alors observer la mise en place de toute une hiérarchie dans un groupe comptant une dizaine de poissons, la relative agressivité des dominants se répartit sur tous les membres du groupe.
Ils nagent volontiers à travers la végétation, et sous le couvert des plantes hautes.
Généralement calmes et peu agressifs, leurs relations avec les autres poissons du bac sont tout à fait correctes, sauf s’ils sont en période de frai ou quand ils gardent leurs jeunes. Là ils pourchassent tous poissons qui s’aventurent trop près, et défendent leur territoire avec une certaine énergie. …et comme ils sont capables de frayer toutes les 3 semaines pendant 2 ou 3 mois, l’ambiance dans l’aquarium peut être houleuse.

Les A. thomasi sont très intéressants à observer, car on assiste à des changements de robes selon les heures de la journée et selon leur activité.

Chez les adultes, la couleur varie selon l’humeur des poissons : quand tout va bien, ils sont gris argent, bleutés même sous les reflets des tubes fluos, avec une tache bleue brillante sur chaque écaille des flancs et de la tête. Sur leur nageoire dorsale, on admire une bordure rouge ou orange.

Quand ils sont agités ou au moment des distributions de nourriture, on voit apparaître 3 taches, une placée sur l’opercule, une autre assez large au milieu des flancs et une plus petite sur le pédoncule caudal.

Quand ils sont stressés les tâches disparaissent et c’est carrément six barres sombres verticales qui apparaissent avec en plus une barre noire oblique qui couvre l’oeil

Au moment des reproductions, la robe des mâles et des femelles varie encore plus. On les voit alors avec diverses taches plus ou moins sombres, parfois très noires, toujours avec une ocelle sur les opercules.

Quand ils gardent leurs jeunes, leur robe est assombrie, les taches sont plus noires et les marques bleues sont vraiment iridescentes

Les jeunes et les poissons immatures sont plus souvent tachetés ou marbrés, même au repos.

Nourriture
A. thomasi sont pas des poissons délicats ni difficiles à nourrir, et pour les maintenir en bonne santé, il faut veiller à leur fournir une alimentation aussi diversifie que possible. Leur régime alimentaire se compose de nourriture animale vivante si possible, ou congelée, daphnies, cyclops, larves de moustiques, vers de vase, et de granulés, parfois de paillettes ou flocons à composante végétale. Pour encourager les poissons à se reproduire la distribution régulière de nourriture vivante est un net avantage

La reproduction des Anomalochromis thomasi est fréquente, même en bac communautaire. Les couples se choisissent il n’y a pas de supériorité du mâle ou de la femelle, leur instinct parental est très développé, tous les deux surveillent les jeunes; ce sont des pondeurs sur substrat découvert. La femelle dépose 200-300 oeufs jaune clair sur une pierre plate ou dans une cuvette creusée dans le sable, parfois dans un pot de fleur couché ou une grotte, ou même sur une large feuille d’Anubia bien nettoyée. La femelle se charge de l’aération des oeufs, retire ceux qui ne se développent pas et déplace les larves en les prenant dans sa bouche. Le mâle lui, s’occupe d’éloigner les curieux et n’hésite pas à s’attaquer à des poissons plus gros que lui ou la main de l’aquariophile quand il se sent menacé. Les 2 parents sont très attentifs aux alevins et montent la garde.
L’éclosion a lieu après 48 heures, il faut attendre encore 4 à 5 jours avant la nage libre ; les jeunes tous frétillants restent groupés sous la surveillance féroce de leurs parents qui éloignent tout prédateur potentiel. On peut alors commencer à les nourrir d’infusoires ,de nauplies et de cyclops. Ils grandissent vite durant les premières semaines puis leur croissance ralentit nettement.
Il est intéressant de relever que les paramètres de l’eau jouent un rôle important dans la répartition du sexe des alevins. En eau acide, pH en dessous de 6.2 il naît plus de mâles, en dessous de 6 il n’y a plus que des mâles et aucune femelle. Avec un pH supérieur à 7, il y a une nette prédominance des femelles. Idéalement il faut un pH entre 6,3 et 6.6 pour obtenir un nombre plus ou moins équivalent de poissons des 2 sexes.

AQUARIUM.
Un bac de 120x40x50 soit 240litres, bac communautaire fluviatiles africains, permet d’introduire 2 couples. Dans une cuve de 150x50x50, on peut prévoir un groupe de 5 à 7 poissons. Une grande surface au sol est plus intéressante qu’un bac haut et étroit.
Filtration interne ou externe, avec un débit de 600l/h à 1000 l/h compose de mousse bleue et de perlon et de « nouilles» en céramiqueª comme support bactrien. Il faut filtrer 3 à 4 fois le volume du bac en une heure et assurer un brassage suffisant. Le tuyau de rejet du filtre placé juste sous la surface crée des remous qui favorisent les changes gazeux. Un combin de chauffage permet de maintenir la température à 25 degrés.

Il faut compter 1 Watt pour 2 litres d’eau. Ils apprécient des zones d’ombre on peut laisser des plantes couvrir la surface pour atténuer la lumière. L’éclairage de 12 heures sans coupure est réglé par une minuterie.

L’aquarium doit être plant avec beaucoup de cachettes et des zones d’ombre, des racines, des pierres et divers galets plats, péricarpes de noix de coco, demi-pots de fleurs couchés comme support de ponte.
Des plantes à tiges,Vallisneries, Hygrophilia, Ludwigia qui laissent libre un large espace de nage. Les emplacements moins bien clairs peuvent recevoir quelques Cryptocorynes ou des Microsorum fixés sur des racines. Les puristes préfèreront choisir des Anubia,
Bolbitis heudelotii et Crinum natans, qui sont des plantes d’origine africaine.

POPULATION.
Ils peuvent partager leur bac avec d’autres poissons vivant en eau douce et acide.

Un petit banc d’Alestes longipinnis qui sont grégaires et parfaitement adaptés à un aquarium communautaire. Mais ils sont actifs, vifs et nerveux et capables de sauter hors du bac. Il faut leur laisser un large espace de nage sans obstacles et leur procurer des cachettes et refuges grâce à des massifs de grandes plantes. Comme ce sont des poissons de rivière et d’eau vive, ils apprécient l’eau brasse et un bon courant

On peut les faire cohabiter avec des Phenacogrammus interruptus,qui sont des poissons grégaires paisibles et bons nageurs mais parfois assez craintifs, et qui apprécient aussi un bac bien planté et pas trop éclairé

On peut aussi ajouter un petit groupe de poisson-chat, Synodontis nigriventris, qui nage « à l’envers » avec le ventre en l’air. Ils restent cachés une bonne partie de la journée, mais sont très actifs en fin de journée, le soir et la nuit. Ils réclament des cachettes, des souches et racines, un tas de pierres, des bois emmêlés. En aquarium leur taille ne dépasse pas 10 cm et leur comportement est tout à fait paisible.

Ce texte a été écrit pour le numéro 222 d’Aquarium Magazine paru en août 2005 ©Véronique Ivanov.